Quand je vais voir mon mĂ©decin et que tout va bien, je raconte toujours que mon mĂ©decin est content. C’est un peu vrai, il sourit quand tout va bien, comme souriait Cheryl Ă Toronto, lors de nos rencontres trimestrielles ; c’est surtout un moyen d’exprimer pudiquement mon soulagement de savoir que ma santĂ© est bonne.
Je ne sais pas comment ça se passe dans le cas d’autres affections de longue durĂ©e mais le rapport mĂ©decin-patient est particulier dans le cadre du sida. D’abord parce que les mĂ©decins ont longtemps Ă©tĂ© dĂ©sarmĂ©s face Ă la maladie et au mode de vie de leur patient, puis parce que les mĂ©decins ont dĂ» apprendre Ă accepter les personnes qui vivent avec le virus comme les experts qu’elles sont.
Si encore aujourd’hui, on s’accroche et qu’il faut parfois insister pour se faire entendre, j’aime bien croire que le sourire de mon mĂ©decin est sincĂšre. Ăvidemment, l’implication n’est pas la mĂȘme, on parle ici de ma vie, et de son boulot. Mais c’est peut-ĂȘtre ça la compassion. Pas la pitiĂ©, ni l’accablement conjoint. La sincĂšre volontĂ© de vouloir se battre avec nous. Et les souvenirs communs. Les ennemis de mes ennemis sont mes amis, parfois.